histoire d'une conversion

 C'est décidé, j'ai décidé de devenir bouddhiste. Avec une légère appréhension pour ma coupe de cheveux, vous m'écoutez, respectez mon choix.

C'est décidé, je vais devenir musulman. Là encore, vous êtes légèrement étonnés, mais vous vous dites que mon mariage avec une musulmane doit y être pour quelque chose.

C'est décidé, je serais catholique. Là, vous vous esclaffez, vous êtes choqués, faites une moue dubitative (qu'il ne faut pas confondre à la moue que fait un éjaculateur précoce).

Marrant, le différent traitement qu'on accorde aux différentes religions, cette laïcité élastique qui caractérise nos contemporains.  

Je viens de voir un film, d'ailleurs, qui traitait du sujet. Qui a envie d'être aimé? Un film mauvais, comme beaucoup de réalisateurs français en font: la crise de la quarantaine d'un parisien sans charisme, mais pourtant avocat. L'originalité du film, c'est qu'au lieu de coucher avec sa bonne, il épouse Dieu (léger comme originalité). Bref, tout son entourage se moque, ou est offusqué, et ses gestes de nouveau bon chrétiens, qui consistent à devenir gentil se soldent par des échecs. Normal.

Je parle ici du cas général, car actuellement, un contre-exemple peut nuancer fortement mes propos. Il y a quelque mois, une connaissance, qui côtoie un groupe d'amis aux tendances taquines et très railleuses (tout le monde en prend dans la gueule, sauf leur chef), nous apprend qu'il a été à la conférence d'un discoureur oriental, qui prônait le bonheur.

A la suite de cette conférence, ses messages fesse de bouc changèrent radicalement, il se mit à dire à tout le monde: «bonjour la vie», «les coccinelles sont amour», «j'aime la beauté», etc. Du coup, tout le monde lui disait ta gueule, et se moquait de sa nouvelle pseudo philosophie pré-mâchée. Je l'ai vu au jour de l'an, et aurais aimé lui filer l'intégrale de Schopenhauer pour lui remonter le moral (en gros, ce philosophe dit que soit l'homme s'emmerde, soit il morfle).

Il se calma, et l'histoire aurait pu s'en arrêter là, mais il y a deux semaines, il coupa les ponts avec tout le monde. Ne répondait plus au téléphone, aux sms. Puis, une sienne amie l'a croisé. Il était totalement différent, sa jovialité était devenue taciturne, et il refusa de répondre au bonjour poli de son amie.

Du coup, tout le monde flippe, et croit qu'il est embrigadé dans une secte, qu'il va finir à distribuer des tracts clamant: réveillez-vous! Personnellement, je considère que si il se fout dans la merde tout seul, c'est qu'il est faible, et qu'il ne méritait que ce qui lui arrive, mais je suis bien le seul à ne pas m'inquiéter, et je n'irais certainement pas le sauver. 

Du reste, j'ai d'autres chats à fouetter, à savoir retarder ma propre conversion. Oui, je deviens moi-même chrétien: je me suis enfermé dans un monastère cet été, «juste pour voir», j'ai été voir le jour de leur sortie de films sur les chrétiens (oui, j'ai vu les moines aussi), et j'ai lu un bouquin sur la conversion de son auteur. C'est louche, tout ça. Je dois couver quelque chose de pas joli-joli.

(première publication : 18/2/2011)