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L ' O N A N E U R
20 mai 2012

retraite monacale

Passons maintenant à ce qui sortit de ces 12 jours de vie monacale. Depuis quelque temps, mon athéisme borné et totalitaire s'émoussait quelque peu, pour des raisons que j'ignore totalement. Je devenais de plus en plus tolérant vis-à-vis des chrétiens qui subissent sans broncher moqueries et reproches?

Je peux diviser mes observations en deux catégories, liées aux deux lieux du monastère que je fréquentais. La chambre, et l'église. La cellule, et le couloir vide me firent instinctivement penser à un vieil hôpital, notamment à travers le carrelage du sol et le blanc sale des murs. Chaque son émis était amplifié par un écho comme si les lieux, trop habitués au silence, te reprochaient presque de vivre. Austérité et presque hostilité étaient les maîtres mots des lieux de vie. Tout ressemblait et évoquait l'hôpital, jusqu'à la salle d'attente mise à disposition des retraitants avant le repas.

cloitre-du-monastere-des-carmes-ploermel


A cet univers très froid, presque frigide, s'ajoutait le temps, excessivement long. Sans ordinateur, téléphone, bref, sans technologie qui fait du son et des images, le temps s'allonge, et vite, on s'ennuie, et on cogite. J'avais certes de quoi écrire et lire, mes ma réserve de livres fut réduite à néant avant la fin du séjour. Or, à trop rien faire, je me suis vite mis à me morfondre, sans doutes parce que je me posais des soucis avant mon entrée au monastère. Il aurait fallu que j'y aille l'esprit serein, malheureusement, la dernière fois que je fus serein, j'avais 3 ans et demi... Ce face à face avec moi-même ne m'a rien apporté de bon, ni de mauvais d'ailleurs, à part un malaise persistant qui s'attachait à moi dès que je posais mes activités.

L'église, elle, était toute différente. Une chaleur s'en dégageait, les lumières la baignaient d'une clarté dorée, et les chants accompagnés par l'orgue, parvenaient à remplir les lieux qui sans cela était vide. Dès que les sons s'évanouissaient, en effet, une vague de vide déferlait dans la nef. On aurait pu espérer une réponse aux appels
des moines, mais il n'y avait rien.

Dieu était irrémédiablement absent du monastère. Certes, des des croix et des imprimés parlant de l'expérience du chrétien abondaient, mais Dieu, qui est sensé loger au coeur d'un tel lieu demeurait invisible et inaudible. Seuls régnait un vide sidéral et sidérant.

Je réalisais alors que les recherches des moines étaient vaines, inutiles et même aberrantes. Tout les signes qu'ils vénéraient semblaient dénuées de sens, et même la croix (seule décoration de ma cellule) n'attirait pas mon regard. Elle était là, accrochée, mais rien ne s'en dégageait. L'idée de la retourner ne m'est même pas venue à l'esprit tant cette pièce de bois demeurait insignifiante. D'ailleurs, proférer un blasphème me semblait tout aussi ridicule, car si Dieu n'était pas là, l'insulter ne servait à rien. Pas plus que le louer ou le chercher.

Au fond de l'église, l'orgue était certes majestueuse, mais les vitraux abstraits et les murs blancs contrastaient avec ce que je savais des églises médiévales entièrement peintes, aux vitraux figuratifs, et donnaient le sentiment d'une absence pesante de la part de Dieu.

En vérité, je vous le dit (comme dirait Jésus le Christ), je n'éprouve aucune animosité à l'égart des moines, même si leur recherche ne mène nulle part, je respecte leur choix de vie qui consiste à se mettre à l'écart du monde. C'est contre les bigots que ma haine s'est avivée. Et j'en ai vu, des bigots!

En temps normal, ils ne me dérangeaient pas, ils n'est pas inscrit sur le front que quelqu'un est un bigot. C'était surtout quand ils entraient dans l'église qu'ils m'exaspéraient dans leur pieuserie minable. On aurait dit qu'un concours de génuflexion avait été organisé, c'était à celui qui restait au sol le plus longtemps. Alors que les moines se contentaient de s'incliner devant l'autel, il y avait des gens qui défaillaient du genou dès qu'ils pénétraient l'église. Et lors de la distribution de l'hostie, le même cinéma reprenait.

Je tiens ici à faire une faveur aux scouts arrivés là par hasard. Deux groupes, en effet, occupaient une bonne partie des bancs, et tous génuflexaient lors de la communion, certains, même, poussaient le vice à poser le front sur le sol, et restaient ainsi prostrés dans une attitude feinte caractéristique. Tous sauf un, qui restait stoïc et ne défaillait pas. Son plus proche voisin lui lança, semble-t-il, une remarque acerbe, sans doutes pour critiquer sa différence, à laquelle le résistant répondit en lui assénant un violent coup derrière la tête. Et là, je dis bravo! Une telle force d'esprit aurait mérité que je lui donne un chèque, si j'avais été à proximité du scout, pour sa bravoure.

Pour conclure enfin mon expérience, si on me demandais ce que je ressens pour les moines, je répondrais sans doutes de la peine. Et du respect. De la peine parce que ces gens continuent à officier dans un monde qui n'est plus le leur. Les lectures lors des repas, sur les problèmes que pose aujourd'hui encore aux croyants, et sur l'impossibilité de renouveler assez la religion pour qu'elle puisse prendre pied en Asie en sont des preuves suffisantes.

L'absence de Dieu dans le monastère, mais aussi au fond de leurs yeux (je n'ai vu en ces moines que des gens comme vous et moi) l'a donné de la peine, un peu comme une mère qui continuerais à parler à son fils alors qu'il est mort m'en donnerait. Cette résignation à continuer coûte que coûte les mêmes gestes est digne du respect le plus sincère. En somme, de la peine pour les moines, et de la haine pour les bigots.

Cela dit, j'aimerais aller au coeur du moyen-âge, dans un monastère, pour savoir si, à l'époque, le clergé était si différent que ce que je semble croire. Que pensais un moine avant que l'Eglise ne prenne son premier coup? Le mystère est entier.


(première publication : 17/8/2010)

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