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L ' O N A N E U R
23 juillet 2013

Deutsche Qualität (3)

Un rideau cache l’ensemble de la scène, tout est plongé dans le noir. Une série de notes angoissantes s’élèvent progressivement, suivies d’une quinte d’explosions. Des fusées jaillissent derrière le rideau, illuminant dans leur flash le décor. Le calme revient sur scène, tandis que l’excitation s’étale comme une trainée de poudre dans le public.

Certains ont besoin d’une poignée de chansons pour chauffer leur auditoire, ce n’est pas le cas pour Rammstein. Deuxième salve de fusées, qui pètent en même temps que la batterie. Je n’ai pas le temps de vraiment voir ce qu’il y a derrière le rideau. Je sais simplement que le batteur, Schneider, est à son poste.

Troisième, quatrième, cinquième salve. Le rideau tombe en même temps que les riffs de guitare commencent. Une vague, un raz-de-marée, un tsunami gonfle derrière moi, et me pousse un peu plus contre la barrière. Je suis à cinq mètres du groupe, à cinq mètres de ces Allemands qui habitent mon MP3, ma chaîne hifi... Il y a quelque chose d’irréel dans cette situation.

vieillchar1Dans une pluie d’étincelles qui aspergent le centre de la scène, Till, le chanteur, descend d’un monte-charge couvert d’une moumoute rose d’un goût approximatif. Le visage fermé, il ne regarde personne. Je n’ai plus le temps de penser, le refrain de la première chanson explose. « ICH TU DIR WEEEEH !! » C’est si bon ! Je prends mon pied, un truc de malade.

 Deuxième chanson. Seul Flake, au clavier, est éclairé, puis vient au tour du batteur, jusqu’à ce qu’une explosion tonitruante annonce le début de la chanson. Le matos est impressionnant, rien que pour la lumière, les projecteurs représentent le logo du groupe.

 J’accorde une importance particulière au clavier, le doigt pointé en l’air, Flake l’abaisse mécaniquement, tel un automate, sur le refrain de la chanson. Eternelle question : « WOLLT IHR DAS BETT IN FLAMMEN SEHEN ? » Soudain, tout noir, pendant quelques longues, interminables secondes. Détonation Till apparaît armé de gants crachant des étincelles. La chaleur commence à se faire sentir, mais ce n’est pas fini : pendant le dernier refrain, des boules de feu parfaitement alignées s’élèvent, toujours au rythme de la musique saccadée.

Sous sa capuche, le discret bassiste Oliver Riedel. Puis, les six Teutons prennent la suite, entre des colonnes de fumée. La chanson « KEINE LUST » fait partie des chansons qui sont les plus faciles à chanter, et Till, entre deux mimiques (simulant masturbation et sniffage de coke), invite le public à participer. Et franchement, il n’avait pas besoin de le faire deux fois. Le volume des voix était déjà poussé au maximum des capacités. Pour s’en convaincre, le guitariste Richard enlève son oreillette. Il est impressionné, un peu comme si au final, c’étaient six Allemands qui étaient venus au concert d’un groupe de 25 000 personnes. Ça ne serait pas rentable, mais on n’est pas loin de ça.

Moins fan du morceau suivant, j’ai pris le temps d’admirer plus en détail les effets scéniques mis en place. Explosions en intro, lumière rouge qui pulsait au rythme de la batterie, projecteur de poursuite braqué sur Till, jusqu’au refrain où l’arrière s’éclaire. C’est alors que les dispositifs pyrotechniques que j’avais pu voir mettre en place s’enflamment, ajoutant à l’ambiance glauque de la chanson. Dans la pénombre, j’ai même pu voir les techniciens enlever rapidement les couvercles avant l’allumage. Aussi discrets que des éléphants dans des magasins de porcelaines.

Les bouteilles d’eau passaient dans le public, une grande majorité se vidant de leur contenu sur la tête d’un festivalier en surchauffe. En échange, régulièrement, la foule apportait son lot de jeunes filles, vierges de tout spectacle à sensation, la bouche ouverte, les yeux hagards devant tant de brutalité bestiale. Un commerce somme toute convenable. Une fille contre une bouteille d’eau.

vieillchar« ASCHE ZU ASCHE » m’extirpe de mes rêveries d’un monde où la femme serait une monnaie d’échange. Toutes les lumières sont rouges, je reprends mon chant mélodieux. La tête secouée d’avant en arrière jusqu’au solo de clavier, toujours fascinant dans la manière toute particulière et personnelle qu’à Flake de bouger ses membres. Les guitaristes reprennent le refrain, et les micros s’embrasent. Le souci, c’est qu’en plein air, il y a du vent, et si Paul (sur la gauche) ne rencontre aucun problème, Richard est contraint de se contorsionner pour éviter les flammes qui lui lèchent les pectoraux !

Du rouge vif, les tentures passent à l’orange. Très rapidement excédé par les sons stridents du clavier, Till avance vers Flake pour lui asséner un violent coup sur le crâne. Je me demande si je ne devrais pas faire ça avec mon voisin. Pendant le solo, je profite encore une fois de ma position, et de ma connaissance du spectacle pour examiner la mise en place du prochain dispositif : les masques cracheurs de feu. Les deux guitaristes se font poser les appareillages, puis branchent le tout à une bombonne à leurs pieds. Il leur suffira d’appuyer sur une pédale pour cracher du feu. Magique ! « FEUER FREI !!! » Les trois masques s’allument, et à ce moment précis, je ne pense pas exagérer en disant que la température est montée à plus de 50 degrés à quelque pas de la scène. J’ose imaginer ce que le groupe doit ressentir.

 

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