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L ' O N A N E U R
22 octobre 2012

jouer sa dernière carte

 

 

 

De temps en temps, il me vient le besoin de m'entourer de mes congénères. La chose peut à première vue sembler des plus étonnantes venant de moi, qui aimé à me vautrer dans misanthropie inacceptable et indigne de mon espèce. Quelles raisons peuvent me pousser ainsi épisodiquement à me tourner vers des gens à l'ADN si proche du mien, mais à la constitution cérébrale si opposée ?

Ceux qui répondront que c'est le travail rémunéré qui me conduit à de telles extrémités se trompent amplement. Car certes il m'arrive de m'entourer de concitoyens pour extorquer des fonds à un patron avare, mais le fait d'être entouré n'est qu'un épiphénomène théoriquement négligeable (quoi qu'en pratique, c'est bien là que réside la plus grosse partie des souffrances au travail : avoir des collègues ne disposant pas de la même intelligence que soi).

 

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Non, si je me rends sciemment chez des êtres humains, c'est bien pour leur proximité en tant que telle. Parfois, m'étant trop éloigné de ces primates sous-évolués, j'en arrive à oublier les désagrément de leur compagnie, alors, comme pour la vaccin, il faut faire une piqûre de rappel.

Je trouve que l'évocation du vaccin est parfaitement trouvé, sauf qu'en l'occurrence, c'est moi qui suis injecté dans un corps sain, et qui souffre de tout les anticorps aux idées reçues mainstream et d'une indigente banalité. Qui ont très vite raison de ma force morale et physique, même si je suis parfois tenté de me noyer dans l'alcool pour me rabaisser à leur niveau. Du coup, j'en arrive à me demander si la vaccin est créé pour préserver les organismes sains de maladies potentiellement létales, ou pour sauver les maladies d'environnements qu'il leur serait trop facile de ruiner si seulement elles en avaient la volonté.

Bref, cette courte introduction pour dire que dernièrement, je me suis entouré d'une cour d'anticorps développant des sujets aussi étonnants que leurs exploits cynégétiques dans la grande surface voisine, ou leurs anecdotes de boulot revues et corrigées par on ne sait quel comique à la mode.

Mon esprit pleurait déjà de ces insultes tout ceux qui ont osé dire que l'homme était un animal intelligent. Mais, par désir de camouflage, j'ai narré moi-même ma propre historiette, tout en pensant à Nietzsche. Tout ce qui a un prix n'a pas de valeur, disait-il. Si j'avais voulu appliquer ces propos, j'aurais gagné plusieurs millions rien qu'avec mon récit.

Malheureusement, je crois que les globules blancs m'ont repéré car l'un d'eux, à cours d'arguments a sorti un jeu de cartes. A ce moment là, j'ai cru que Dieu, mécontent pour mon mépris teinté de haine envers sa création s'est vengé. Je me suis dit qu'au final, la ville de Sodome n'a pas péri sous les flammes, son châtiment fut pire que ça : Dieu leur proposa de jouer aux cartes.

Tout en moi me disait de fuir ou de me suicider à coup de pepper mint. Le seul alcool qui donne bonne haleine mentholée quand on en abuse. Le microbe que j'étais regretta amèrement d'avoir eu besoin de cette piqûre de rappel.

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S'il y a bien une chose que je hais, ce sont les jeux de carte, même si à la réflexion, je déteste tout ce qui ressemble de près ou de loin à un jeu. Cette antipassion me rend d'autant plus exceptionnel que je suis un collectionneur de tarots. Le tarot qui se rapproche plus d'une oeuvre d'art que d'un jeu, le simple fait de l'associer au mot jeu est le pire oxymore que la langue ait pu inventer. Qui osera parler du jeu de la chapelle sixtine concernant les peintures des voûtes ?

Bref, jouons, alors... J'étais un condamné à la potence. La main tremblante, je saisis le paquet de cartes qui se présente devant moi, l'esprit aussi vide que pourrait l'être un trou noir. J'ai les doigts moites, la gorge désertiques, le regard absent. La partie peut commencer.

Dans beaucoup de jeu de cartes, les joueurs sont censés développer l'ensemble de leurs capacités cognitives pour savoir quelles cartes possèdent les autres joueurs. Par la suite, la partie peut devenir intéressantes, ponctuée de cris de fierté proches de ceux du cerf qui brame son besoin de se vider les couilles : « je le savais ». Les cartes m'en tombent. Sur un jeu de deux cartes, je serais incapable de déterminer quelle carte possède mon adversaire. Alors imaginez quand il y en a plusieurs dizaines!

Tel la roulette russe, on tourne dans le sens des aiguilles d'une montre. Sauf qu'à l'inverse de ce jeu de hasard des plus passionnants, je suis certain de me prendre une balle dans la tronche.

cartenutri_balance_chateau_cartes_hdDès le premier passage, me voici vide de tout ce qu'on peut appeler règle du jeu. La valeur des cartes ne veut plus rien dire pour moi, et je suis si mauvais que la chance du débutant n'envisage pas une seconde à s'abattre sur moi. De toute manière, même si c'était le cas, je serais capable de finir bon dernier.

-Vous n'avez pas soif ? -Non, on joue. -C'est bien ce que je craignais... Subrepticement, j'approche mon briquet de mon éventail de cartes, mais l'humidité de mes mains les empêche de s'enflammer.

Que faire pour éviter le désastre et l'opprobre ? Intérieurement, je maudis l'être qui s'est dit un jour qu'on pourrait s'amuser avec des bouts de cartons tenus par un coin. Cet homme, j'en suis certain, a pensé à moi quand il dessinait le premier jeu de l'histoire.

Je fais mon possible pour cacher ma honte insoutenable, mais un mur de béton ne serait pas suffisant.

-Il est nul ce jeu, vous ne trouvez pas ? -Non, on fait la revanche!

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Au comble du désespoir, je m'interroge sur les symboles représentés. Les chiffres se brouillent, et mon cerveau se met en pilotage automatique, c'est à dire qu'il se met à penser à tout ce qui peut s'éloigner le plus possible d'un jeu de cartes, à savoir la dernière musique entendue sur direct star. Aussi pourrie qu'elle puisse être, mon cerveau la fredonne, pour le sauver. Je crois d'ailleurs que si par aventure, je me trouve attaché à un pieu, le visage situé approximativement à trois centimètres d'un braséro, avec un homme en cagoule qui me fait des franges au prépuce, je me remémorerait le dernier classement du hit parade pour passer le temps.

Le lendemain, je suis étonné de ne pas sentir de corde de chanvre autour de mon cou. Voilà, je déteste à nouveau les humains, merci beaucoup!

 

 

 

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