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L ' O N A N E U R
30 mai 2012

éloge des maladies mortelles

éloge des maladies mortelles

Toute société aime se faire peur, éprouver des frissons, et quoi de mieux, pour se faire, d'évoquer les maladies, virus ou microbes, organismes invisibles à l'oeil nu, mais responsables de destruction systématique des corps.

Ainsi, il est étonnant de constater que la peur d'une maladie se rattache aux caractéristiques d'une société, à fortiori, il serait intéressant de faire un historique des maladies, et de chercher à en déduire la nature d'une société.

Il y a eu la lèpre, qui détruit les membres, la peste, qui faisait apparaître des bubons noirs sur le corps des victimes, causées par la colère de Dieu, qui était à l'époque assez susceptible comme gars, et aimait faire fondre des fléaux sur une humanité pécheresse. Jésus, le rédempteur, s'est occupé de beaucoup de lépreux, et en a guéri pas mal, signe du pardon de Dieu qui arrivait enfin. Ces maladies étaient des moyens de faire peur avant la damnation éternelle.

Le scorbut, touchait les marins au long cour, qui faisait chuter les dents, et provoquait des hémorragies. Plus tard, la siphylis, transmise par voie sexuelle, qui pouvait conduire à la paralysie et à la mort. Elle fut le lot de nombreux artistes de la fin du 19e siècle, Baudelaire en tête, qui menaient des vies de dilettantes, et de luxure esthétisante.

De nos jours, nous pouvons dénombrer trois maladies qui occupent tout les esprits. Il y a le sida, le cancer, et alzheimer.

La première d'entre-elles (mes maladies ne sont pas classées du tout, il n'y a aucun ordre volontaire), est apparue dans les années 80, les premiers morts, parmi les homosexuels et les rock-star ont fustigé la communauté gay, pour leurs moeurs libertines, mais très vite, on réalisa que la maladie ne touchait pas qu'eux, qu'elle pouvait aussi bien se transmettre à des hétéros.

La liberté sexuelle érigée en dogme en 68 est tout de suite freinée par le VIH, qui impose aux couples de se protéger quand ils font l'amour, un comble. Particulièrement pervers, le sida se transmet par voie sexuelle, et n'attaque que les cellules de défense de l'organisme, les globules blancs, policiers du corps. Dans un délire interprétatif complet, on peut y voir un signe de la dislocation de la vertue, et une perte de repère totale, dans une attaque injustifiée des autorités, représentés par les globules.



éloge des maladies mortellesLe cancer, ou plutôt les cancers, sont des maladies qui n'ont pas d'origine virale, il s'agit du corps qui se détraque, et qui voit ses cellules se multiplier de manière anarchique, occuper l'espace, envahir le corps, et enfin, tuer l'individu qui les a vu (ou non) se former.

Or, ce thème de développement anarchique est à mettre en parallèle avec le fonctionnement économique actuel. Sensées fonctionner en harmonie, dans une libre-concurrence saine, certaines entreprises se mettent à enfler, et désirent toujours prendre plus d'espace, jusqu'à avoir un monopole dans un, et de préférence plusieurs domaines, bloquant ainsi un secteur entier de l'économie au détriment de toutes les autres entreprises qui l'entourent, et de l'équilibre que le capitalisme souhaite.

Enfin, Alzheimer. Le nom, en premier lieu fait peur, mais la maladie qu'il désigne est une source d'angoisse: voir un père oublier jusqu'au visage de ses enfants est source d'angoisse légitime. Cependant, notre société entière est victime de cette amnésie pathologique. Le culte du tout jetable, des appareils-photo aux rasoirs en est l'un des symptômes, mais surtout, l'avènement de l'ère numérique est un pas supplémentaire vers la perte de mémoire. Les élèves n'apprennent plus, ils se contentent de se connecter sur internet pour avoir les réponses, les administration demandent de plus en plus de remplir des formulaires informatiques, qui ne laissent aucune trace une fois envoyés, les exemples sont foison dans cette amnésie collective où plus rien n'a de trace fixe et définitive.

(première publication : 19/12/2010)
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